L’heure du départ de Phill finit malgré tout par arriver.
Je les laissais échanger un dernier baiser et des promesses de se revoir dès que possible.
Ce qui n’arriva pas.
En effet, alors qu’ils avaient repris un rythme de croisière en ce qui concerne les échanges à distance, deux évènements vinrent contrecarrer leurs espoirs de retrouvailles à moyen terme et la possibilité de se parler tout court.
Le premier fut la mutation de Phill outre atlantique.
Ce n’est déjà pas facile de se ménager du temps pour se voir quand on est éloignés de 700 bornes, alors quand ce sont 6000 kilomètres et un océan qui vous séparent…
Le deuxième et principal évènement fut le véto soudain et radical imposé par Emma.
La femme de Phill estimait que cette liaison dépassait largement le cadre du libertinage classique, qu’elle prenait beaucoup trop d’importance vis-à-vis de leur propre couple et que comme Phill ne semblait pas capable de mettre la pédale douce, elle lui intima l’ordre de tout arrêter du jour au lendemain.
Evidemment, il obtempéra. Cette relation avait beau lui procurer beaucoup de plaisir, elle ne faisait pas le poids vis-à-vis d’une vie de famille équilibrée, d’une femme et de trois enfants en bas âge.
Et il était vrai qu’un cap avait encore été franchi après notre week-end à trois et le ton des messages entre Phill et Raphaëlle avait assurément évolué depuis.
Car au-delà des habituels fantasmes érotico-sexuels qui avaient constitué jusqu’alors le gros de leur relation, il était de plus en plus courant de lire des mots tels que « mon amour », « ma chérie » ou « je t’aime » dans leur échanges.
Incontestablement, cette histoire n’était plus seulement une affaire de cul ou de libertinage mais il fallait bien admettre que des sentiments et même des sentiments forts étaient nés entre eux deux.
Pas étonnant donc qu’Emma se soit sentie en danger, même si nous étions loin les uns des autres, même si ma femme avait tenté de la rassurer sur ses intentions.
Et pouvait-on l’en blâmer ?
Non, parce qu’elle était sans doute la mieux placée pour connaître les limites de sa tolérance.
Non, parce que Phill avait été peut-être moins transparent avec elle que Raphaëlle ne l’avait été avec moi.
Non, parce que de toute façon, les meilleurs intentions n’ont que peu de poids lorsque les sentiments s’en mêlent.
Et moi, me demanderez-vous, n’étais-je pas affecté par cette évolution ?
Si, bien évidemment.
Il serait totalement faux de dire que le fait d’entendre ma femme dire « je t’aime » à un autre que moi ne m’a rien fait.
Et encore heureux !
Heureusement qu’il y avait toujours ce petit pincement au cœur, cette petite boule incandescente dans les entrailles.
Car sinon, ça voudrait dire que ce qui pouvait arrivait à mon épouse m’indifférait.
Et il n’y a rien de pire que l’indifférence dans une relation de couple.
D’ailleurs, peut-on encore parler de relation de couple lorsque l’indifférence apparaît ?
Non, j’avais bien noté le changement de ton et l’apparition des sentiments entre Phill et Raph’.
Mais cela ne m’avait pas autant inquiété qu’Emma.
D’abord parce que comme toujours, ma femme s’était astreinte à une transparence totale vis-à-vis de moi et qu’elle avait su, dés le début, répondre à mes inquiétudes.
Elle avait des sentiments pour Phill, certes, mais ceux pour moi était évidemment d’une autre catégorie sans commune mesure et sans concurrence possible.
Elle aimait Phill, mais m’aimait encore plus et encore plus qu’avant.
Si vous ajoutez à cela certains garde-fous comme l’éloignement et deux responsabilités de famille respectives, c’est donc sans inquiétude que je la voyais s’avancer vers une situation qui a été nommée par certains « polyamour ». Une notion bien borderline par rapport au libertinage, il faut en convenir mais qui existe malgré tout et qui est souvent bien vécue par tous ses protagonistes, pour peu que le mensonge et les cachoteries ne s’invitent pas à la fête.
Mais la fête prit donc fin avec le véto d’Emma.
Ca fait maintenant presque deux ans que tout ceci est arrivé. Nous n’avons plus revu Phill.
Bravant l’interdiction, il lui arrive encore malgré tout d’échanger quelques sms avec Raphaëlle, de façon très sporadique.
Evidemment, notre libertinage ne s’est pas arrêté avec cette expérience.
Au contraire : Encouragés par cette première, nous avons eu envie de découvrir d’autres sensations, d’autres horizons.
Nous avons refait quelques trios, nous avons goûté aux plaisirs du cote-à-côtisme, du mélangisme, de l’échangisme avec plus ou moins de réussite, de bonnes surprises et quelques déceptions…
Nous avons testé d’autres clubs, des soirées privées, des soirées multi-couples mais au final, rien n’égalera sans doute l’intensité de cette première rencontre.
C’est souvent ce qui fait le charme des « premières fois »…
Quant aux plaisirs candaulistes, j’ai eu l’occasion d’en vivre quelques autres aussi, avec des variantes.
La plus troublante fut sans doute cette autre « aventure », qui se déroula quelques semaines après l’épisode « Phill »...
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